LE RAPPORT DE LA GARDIENNE

La commission des marchés publics de l’État vient de publier son rapport d’activité pour l’année 2006. Elle fait état de plusieurs difficultés dans les marchés qu’elle a examinés.

LE FONCTIONNEMENT DE LA COMMISSION

La commission des marchés publics de l’État (CMPE) est chargée de fournir une aide pour l’élaboration et la passation des marchés des services achat de l’État et de ses Établissements Publics autres qu’industriels et commerciaux. En 2006, la commission a reçu 644 dossiers, relevant du code 2004 et du code 2006.

Cette commission est compétente pour examiner tout projet de marché ou d’accord-cadre dont le montant estimé est supérieur à 6 M€ HT. De plus, doivent notamment lui être transmis : les projets d’avenants qui rendent les marchés auxquels ils se rapportent passibles d’un examen par la commission, les marchés complémentaires ou les marchés de prestations similaires qui se rattachent à un marché soumis à l’obligation de transmission, les marchés d’études, de maîtrise d’œuvre, de définition ou d’assistance qui se rattachent aux marchés supérieurs à 6 M€ HT soumis à l’obligation de transmission.

Les services de l’État peuvent demander son avis sur un problème à tout moment de la procédure. Un accompagnement dans la procédure peut également être mis en place, si « des enjeux économiques et financiers ou de la complexité du montage contractuel et des difficultés rencontrées dans sa mise en œuvre » le justifie.

Dans ce cas, le décret du 16 janvier 2007 prévoit que le pouvoir adjudicateur transmet une copie « des procès-verbaux des pièces retraçant les éléments de choix des candidatures et des offres et du rapport de présentation du marché ou de l’accord cadre ». Cependant, cette procédure n’est pas suffisamment utilisée, au goût de la commission. En effet, il existe encore des points à risque persistants dans les dossiers qui lui ont été transmis.

LES GRANDES OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS DE LA COMMISSION

Dans les dossiers qu’elle a examinés, la CMPE a pu constater des imprécisions dans la définition des besoins, ce qui peut poser de grandes difficultés par la suite. Ce manquement déteint en général sur la qualité des cahiers des charges, ce qui peut conduire des candidats évincés à faire annuler la procédure de passation.

Il peut également entraîner des conséquences fâcheuses lors de l’exécution du marché. Par exemple, elle a constaté des « définitions manifestement insuffisantes du besoin » pour des constructions ou des réhabilitations, se traduisant par un programme trop flou pour la suite de la procédure. Pour y remédier, la commission préconise notamment « d’analyser les besoins fonctionnels des services en adoptant, le cas échéant, une démarche en coût global prenant en compte le prix à l’achat, ainsi que les coûts de fonctionnement et de maintenance ».

L’opportunité des choix des acheteurs de l’état est également examinée. En effet, lorsqu’un dossier lui est transmis, la CMPE ne va pas hésiter à demander des explications sur le système d’allotissement choisi ou son absence. La forme du marché peut également faire l’objet d’observations. Pour les marchés à bons de commande, par exemple, elle recommande vivement de fixer au moins un minimum et un maximum, ainsi qu’un écart réduit entre les deux. La durée du marché, sauf pour les accords-cadres et marchés à bons de commande, n’est pas strictement réglementée dans le code. Cependant, la commission donnera des recommandations si cette durée est inadéquate par rapport à l’objet du marché. Toutes ces vérifications sont faites pour obtenir une « adaptation de l’offre et de la demande par l’organisation d’une bonne concurrence ».

SUR LES PROCÉDURES

La commission a aussi veillé à la légalité des procédures. Certaines rubriques des avis de publicité ont été sérieusement examinées. Les modalités de financement et de paiement ont tendance à manquer de précisions, ce qui peut constituer une niche pour les référés. Les procédures de passation et d’attribution sont bien sûr très étudiées. Le choix de la procédure peut être critiqué. Si le code ne conditionne pas le type d’appel d’offre employé, la commission va cependant rechercher si l’utilisation d’une procédure restreinte ne va pas limiter abusivement la concurrence au regard du nombre d’entreprises pouvant répondre à la consultation. Pour ce qui est des procédures dérogatoires, elle va notamment demander à l’acheteur de justifier leur emploi au delà de ce que le code exige en demandant parfois une vraie argumentation.

Quant aux procédures d’attribution, la commission a relevé trop d’erreurs, à son goût, relatives aux critères. La commission a constaté dans certains cas des confusions entre les modalités de sélection des candidatures et celles des offres. Les services doivent veiller à ce que les « mêmes critères ne soient pas utilisés aux deux stades de la procédure, ou encore que les offres ne soient pas jugées sur des critères qui relèvent de l’appréciation des candidats ».

De plus, elle attire notre attention sur le risque de conflit d’intérêt, lors de la sélection des candidats, lié aux marchés d’assistance à maîtrise d’ouvrage pour la préparation d’un deuxième marché public. Elle conseille aux acheteurs de demander, lors du second marché, au candidat retenu « de certifier qu’il n’a aucun lien avec l’entreprise assistante ». Pour le jugement des offres, la commission apporte une grande importance à la pondération des critères : elle appréciera « l’incidence économique de l’importance donnée à chacun des critères ».

La commission se veut également la gardienne des deniers publics. Elle attache une grande importance au prix fixé, aux clauses financières et à leurs conditions d’évolution. Pour certains types de marchés, la commission préconise aux acheteurs de mener une « enquête de coûts » pour connaître la situation du marché. Cette démarche peut notamment aider à détecter une entente. De plus, elle a du rappeler assez souvent que les formules de révision doivent être élaborées à partir de « références qui ne sont pas sujettes à caution, donc sur des indices publiés sous l’autorité de l’administration ». Elle a aussi recommandée fortement de prévoir, malgré la disparition de cette obligation dans le code 2006, une partie fixe dans ces formules de révision.

SUR LES CONTRATS

Sur le contenu des contrats, le rapport attire l’attention sur certaines clauses. La commission veille à ce que les objectifs de développement durable soient pris en compte lors de la définition du besoin bien sûr, mais également dans les conditions d’exécution et les critères de jugement des offres. Elle a également rappelé que les pénalités doivent être «appropriées aux conditions d’exécution des marchés». Les clauses de résiliation ont été regardées de près. Le rapport fait état de plusieurs observations de la commission pour des marchés à bons de commande :

l’indemnité de résiliation à verser « si le minimum n’est pas atteint ne doit pas être fixée dans le marché car le préjudice subi ne peut être établi qu’a posteriori. Les modalités de détermination de cette indemnité doivent être fixées, non pas dans le cadre du marché, mais par un accord ultérieur ou être laissées, le cas échéant, à l’appréciation souveraine des tribunaux ». Enfin, il est rappelé qu’en l’absence des nouveaux CCAG, les acheteurs doivent prévoir dans la clause de résiliation, le manquement aux obligations de l’article 46 du code 2006.

La commission des marchés publics de l’État a encore du travail devant elle. Même si elle a noté une amélioration depuis la publication de son rapport d’activité 2005, elle a constaté que les marchés publics de l’État sont loin d’être tous irréprochables.