Le plan Hôpital 2007 avait été créé pour palier le manque d’investissement des établissements hospitaliers. La MAINH en a fait le bilan pour mesurer son impact, voire justifier sa prolongation.
En matière de construction, les établissements publics de santé (EPS) et les structures de coopération sanitaire dotées de la personne morale publique (SCS) peuvent ne pas appliquer la loi relative à la maîtrise d’ouvrage public.
Cette dérogation provient de l’article L6148-7 du Code de la Santé Publique (CSP), issu de l’ordonnance du 4 septembre 2003, qui leur permet de recourir à un contrat de conception-réalisation, pour tout projet, à la différence des limites posées par la loi de 1985.
La mission nationale d’appui à l’investissement hospitalier (MAINH) (1), chargée d’accompagner techniquement les établissements hospitaliers dans l’exécution du « plan Hôpital 2007 », a effectué un bilan de l’utilisation de cette dérogation.
LE CHOIX DE LA PROCÉDURE DU CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE
L’article L6148-7 du CSP ne pose qu’une dérogation à la loi MOP et non une obligation. Cependant, la MAINH a constaté que les établissements hospitaliers choisissaient souvent cette option depuis son instauration en 2003. Cette tendance n’est pas un hasard : la principale raison de ce succès est le gain de temps qui en résulte.
En effet, selon l’étude, les opérations réalisées par le biais de la « procédure classique » de la loi MOP prennent presque deux fois plus de temps que celles réalisées dans le cadre de la conception-réalisation.
Ce gain de temps peut s’expliquer notamment par l’attribution d’un contrat global qui simplifie beaucoup la gestion de l’opération entre les phases d’étude et d’exécution.
Le rapport met également en évidence le fait que dans le cadre de la loi de 1985,
« la conduite des travaux bien souvent dévolue en lots séparés ou macro lots en loi MOP est exposée à un risque de défaillance d’entreprises bien plus accru qu’en conception-réalisation ».
Cette différence est importante car si les coûts des travaux sont sensiblement les mêmes dans les deux procédures, la réduction des délais entraîne automatiquement une réduction des frais financiers liés à l’opération. Il faut pourtant nuancer ces propos : selon, l’étude, le gain de temps obtenu par la procédure de conception-réalisation n’est pas avéré pour les opérations de très grande importance.
D’autres motivations ont été révélées par l’enquête. Certains établissements hospitaliers se sont servis de l’article L.6148-7 du CSP pour de petites opérations afin de se former
« en prévision d’opérations plus importantes ». D’autres ont préféré recourir à la procédure de conception-réalisation, alors qu’ils envisageaient, avant 2003, l’utilisation du bail emphytéotique hospitalier : « la conception-réalisation a été le plus souvent privilégiée, car semblant plus accessible ».
LA PROCÉDURE DE PASSATION
D’après l’article L.6148-7 du CSP, les établissements hospitaliers doivent respecter « les procédures prévues par le code des marchés publics » et donc son article 69 relatif à la procédure des marchés de conception-réalisation. Cependant, les pratiques sont parfois différentes du texte.
En observant les documents de consultation des entreprises, le groupe de travail a pu dégager certaines tendances qui démontrent bien les préoccupations des établissements hospitaliers. En effet, les critères de sélection et leur pondération sont très révélateurs.
Ainsi, le prix qui est bien sûr toujours présent, est très souvent « pondéré à hauteur de 32 % », ce qui en fait l’élément le plus déterminant dans le choix de l’attributaire. Ce constat peut sembler étonnant car la procédure de conception-réalisation concerne généralement des opérations complexes et la « fonctionnalité » semble être alors le critère le plus important. Il faut nuancer ce propos : ce critère se retrouve dans 94 % des cas étudiés lors de l’enquête du MAINH et il « pèse » en moyenne pour 26 % du total, ce qui en fait un des éléments principaux. De plus, rappelons que le code de la santé publique permet aux établissements de recourir à la conception-réalisation pour toutes opérations et pas uniquement pour des opérations complexes, cas prévu par la loi MOP.
Les établissements hospitaliers insèrent également les critères de la qualité architecturale (11%) et des délais (8%).
Pour ce qui est de la phase de sélection, les comportements des établissements hospitaliers sont très divers. En effet, l’enquête révèle que l’examen auquel procède le jury qui doit évaluer les offres, est plus ou moins approfondi.
Certains jurys sont convoqués deux fois, alors que d’autres se sont contentés d’une seule réunion. Le rapport note également une différence de comportements dans l’appréciation des dossiers : certaines pratiques entreraient davantage dans le cadre d’un dialogue compétitif que dans celui d’un contrat de conception-réalisation.
En effet, les établissements reçoivent parfois des dossiers qui proposent des améliorations par rapport à la demande initiale. Dans ces situations, les établissements arbitrent entre « l’intérêt du projet d’une part, et le risque juridique associé à une modification du cahier des charges d’autre part » et il semble qu’ils y apportent des réponses différentes.
Enfin, l’étude des pratiques pendant la période de mise au point, elle-même, met en avant là aussi des différences. Alors que dans certains cas, les établissements et leur cocontractant se contentent d’entériner les étapes précédentes, pour d’autres contrats, certains éléments substantiels ont fait l’objet de négociations, voire de modifications.
LE CONTRAT
Si l’article L6148-7 du Code de la Santé Publique permet aux établissements hospitaliers de se détacher de la loi MOP, les maîtres d’ouvrage ont voulu reprendre dans leurs marchés des missions de la maîtrise d’œuvre : l’avant projet définitif (APD) et d’étude de projet (PRO) pour la phase et la mission de direction d’exécution des travaux (DET) pour la phase d’exécution.
Les établissements et leurs assistants avouent qu’ils préfèrent conserver des éléments familiers pour la mise en place cette « nouvelle procédure ». En effet, s’ils n’ont pas besoins de recourir à un maître d’œuvre, l’étude a démontré que les « petits » établissements avaient recherché une aide extérieure pour les appuyer, alors que les plus importants ont dirigé, seuls, la procédure.
Le rapport établit que si certains professionnels étaient « inquiets » au départ, seulement 27 % des contrats étudiés ont soulevé des problèmes lors du contrôle de légalité, mais « aucun litige sérieux n’a été relevé dans l’échantillon d’opérations évaluées ».
La procédure mise en place par l’ordonnance du 4 septembre 2003 semble avoir été très bien accueillie par les établissements hospitaliers qui ont vu leurs investissements relancés. Il faut espérer que la prolongation de cette action par le « plan Hôpital 2012 », annoncée par Xavier Bertrand, lors d’une conférence en février dernier, connaisse le même succès.
(1) La MAINH participe à l’élaboration du cadre juridique, technique et financier des programmes nationaux, à leur suivi et à leur évaluation. De plus, elle facilite la réalisation et l’utilisation des nouveaux outils juridiques et financiers (marchés globaux, baux emphytéotiques hospitaliers (BEH), contrats de partenariat) au sein du secteur hospitalier.